MXP4, Spotify et Mark Ronson : un nouveau concept de publicité musicale

Le 23 septembre 2010

Benoît Darcy nous éclaire sur l'intéressante campagne marketing mise en place autour du nouvel album de Mark Ronson, et qui fait la part belle à Spotify et à MXP4.

Si vous suivez les évolutions de la musique digitale, vous avez déjà sûrement dû entendre parler du MXP4. Longtemps décrit à tort comme « un format », il s’agit surtout d’une technologie qui permet de modifier la structure d’une chanson : écouter les différents instruments séparément, accélérer ou ralentir le tempo, time-shifter, etc.

Remix me I’m famous !

Si de fait le MXP4 ne s’est pas imposé dans nos baladeurs musicaux comme standard d’écoute (était-ce le but ?), on commence à entrevoir les différents usages possibles de cette technologie. L’une des plus évidentes, et des plus pérennes – car monétisable – est d’utiliser le MXP4 pour des opérations de marketing musical. Dans cette perspective, le lancement de Record Collection, le nouvel album de Mark Ronson fait presque figure de cas d’école.

Il y a quelques mois, Mark Ronson et son label français, Jive-Epic (l’une des plus intéressantes écuries de Sony Music de par son souci récurrent d’innovation) rendaient disponible en écoute son premier single : Bang Bang Bang, accompagné de son clip. Un bon démarrage pour ce titre qui en France a même été entendu en générique du Grand Journal, émission fédérant une bonne partie de la fanbase (= le cœur de cible) de l’artiste. Au delà de la pertinence de cette mise en avant, il est intéressant d’observer comme le terrain a été préparé pour ce qui allait suivre. En effet, à maintenant quelques jours de la sortie de l’album (les pré-commandes sur iTunes sont d’ores et déjà ouvertes et le disque sort le 27 septembre), voici venir une offensive marketing de qualité.

D’abord un partenariat avec Spotify, permet d’écouter sur la plateforme 5 titres extraits de Record Collection, le fameux nouvel album. L’offre est reservée aux membres premium de Spotify (9,99 euros par mois). Mais surtout, une petite application MXP4 permet de jouer avec trois titres : Bang Bang Bang, The Bike Song et Somebody To Love Me. Concrètement, il s’agit d’écouter les trois morceaux avec la possibilité d’isoler cinq pistes : voix, basse, batterie, synthé1, synthé2. Le tout est présenté à la manière du populaire jeu « Simon » (dont Sting assurait la publicité en 1983), la prise en main est donc immédiate…

Quand l’aspect ludique fait (presque) oublier l’objectif commercial

Bien évidemment, plus vous connaissez et appréciez le titre original, plus vous passerez de temps à triturer les différentes pistes et réinterpréter à votre manière les chansons. L’ensemble s’avère avant tout ludique, et on en oublie très facilement l’objectif commercial d’un tel déploiement de technologies.

Car l’objectif est bel et bien d’ordre commercial, et l’association Spotify/Ronson ne s’arrête pas là. En effet, le géant suédois du streaming profite de ce lancement pour annoncer un nouveau format de publicité sur sa plateforme. Spotify va donc désormais proposer ce genre de widgets MXP4 en tant que format publicitaire. Ils apparaitront en bandeau, prêts à être cliqués et manipulés par l’utilisateur.

Ce mouvement stratégique est à mon sens lourd de conséquences puisque qu’il recentre les enjeux de la publicité interactive sur une notion essentielle qui passe souvent au second plan : l’attention de l’utilisateur. Et de cette notion découle LA question corollaire : comment capter l’attention de l’utilisateur de la manière la plus pertinente possible. Le fait de proposer une application ludique permet d’apporter des éléments de réponses et de renforcer l’efficacité du dispositif.

Ainsi, il ne s’agit plus ici de délivrer un message ou d’inciter à cliquer par le biais d’une opération simpliste de marketing direct, il s’agit de répondre au sacro-saint trio du marketing digital appliqué à la musique, à savoir :

- Engager les fans un peu plus à chaque évènement (sortie d’un single, d’un clip, d’un album, concert…)

- Maximiser la viralité en s’en donnant les moyens (bien que dans ce cas précis, le widget MXP4 de Mark Ronson n’est pas disponible en « embed ». Un choix, probablement pour privilégier les likes sur la page Facebook…)

- Transformer l’attention captée en achat d’album ou de single

Spotify et Mark Ronson s’offrent avec cette opération un joli coup de projecteur mais c’est surtout la plateforme de streaming qui va pouvoir capitaliser sur cette innovation pour développer son offre commerciale et accroitre significativement ses revenus.

Combien Spotify facture aux labels le déploiement du dispositif ? Quels sont les coûts cachés (tracking, bande passante) ? Autant de questions qui n’ont pas encore de réponse mais une chose est certaine, cette avancée constitue une excellente nouvelle qui devrait séduire les labels et majors US, territoire où Spotify n’est pas encore disponible et dont la start-up suédoise a jusqu’alors retardé la conquête…

Article initialement publié sur zdar.net, le blog de Benoît Darcy

Crédits photos : FlickR CC mick 0 ; andres rueda

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