OWNI http://owni.fr News, Augmented Tue, 17 Sep 2013 12:04:49 +0000 http://wordpress.org/?v=2.9.2 fr hourly 1 Faut-il “réguler” l’Internet … http://owni.fr/2009/12/08/faut-il-reguler-linternet/ http://owni.fr/2009/12/08/faut-il-reguler-linternet/#comments Tue, 08 Dec 2009 06:44:20 +0000 Jean Michel Planche http://owni.fr/?p=5983 Hier soir, je m’attendais au pire. L’une des plus difficiles questions au sujet de l’Internet allait être “débattue” à la télévision, en deuxième partie de soirée. Je dois dire que je ne m’attendais à rien et n’ai commencé à regarder cette émission que par la présence de notre camarade Benjamin Bayart, que je soutenais, compatissant, dans cette mission impossible.

Mission impossible car débattre à la télévision, sans le talent d’un Jacques Chancel et sans endormir les foules et ne réduire l’audience qu’à une poignée de spécialistes est devenue presque plus difficile qu’à Tom Cruise de nous faire oublier ses idées philosophiques, lorsqu’il saute d’un avion sans parachute.Mais en voyant le casting … l’affaire tenait au grotesque et s’averait surtout un piège. Piège que l’on a très vite compris, dès le premier reportage, très bien orienté, présentant le sujet à charge.

La baseline de l’émission de Taddei est “l’actualité vu par la culture” (ENORME) et pour se faire, il avait invité, outre Benjamin, deux des grands spécialistes du sujet, aux déclarations souvent fracassantes culturelles :

  • Jacques Séguéla
  • Frédéric Lefebvre

Je ne vais pas relever tous les quotients d’émotions négatives, chargés de faire pleurer la veuve et l’orphelin, toutes les ficelles de la communication utilisées, toutes les aberrations, tous les amalgames, toutes les contradictions, d’un Séguéla visiblement briffé par ses équipes, pour dire moins de bêtises que d’habitude. (ici et là)

Non, je vais juste m’astreindre à expliquer ce que j’aurais aimé voir dans une émission que j’aurais pu regarder, jusqu’au bout, avec plaisir. Une émission qui aurait participée à me faire passer une bonne nuit, plutôt que de m’empêcher de dormir, jusqu’à la décision d’écrire ce billet.

1/ J’aurais aimé un reportage introductif permettant de COMPRENDRE ce qu’est l’Internet et de faire la différence entre ce réseau de flux et les sites web, qui n’en composent qu’une facette.

Cela a été trop rapidement évoqué par un des invités lorsqu’il a dit qu’en greffant une mémoire à l’Internet, on avait supprimé (diminué ?) sa nature de flux. Hors justement, il fallait aller plus loin. La “mémoire” de l’Internet, est-ce encore de l’Internet ?A quels conditions ?

Souvenez-vous ce que disait Vinton Cerf : “if it’s not open, it isn’t the Internet”. (NDLR : OK, Vinton est passé chez UUnet / MCI, Microsoft et il est maintenant chez … Google. Cela n’empêche pas la personne d’être intelligent et jusqu’à preuve du contraire resté fidèle à ses valeurs !)

Il y a ici un point clé qu’il faut connaître et comprendre avant de parler de régulation et de quoi que ce soit d’ailleurs au sujet de l’Internet.

2/ J’aurais aimé voir un reportage pour comprendre qui étaient les interlocuteurs et en quoi ils étaient pertinents.

Cela aurait permis de cerner les personnalités des uns et des autres et surtout d’éviter aux deux trolleurs en chef, précédemment cités, de nous faire la scène du 15. Même Séguéla y est allé de son reniement en disant qu’il n’avait pas dit que l’Internet “était la pire saloperie inventée par l’homme”. Heureusement, le numérique a de la mémoire. Ceci dit, il y a eu tellement d’énormités, (“un journaliste ne publie pas n’importe quoi dans un journal”. sic),même pas relevé par “la culture”, que l’on ne peut que rire et s’inquiéter de la présentation de sujets que l’on connait moins bien.

3/ j’aurais aimé que l’on définisse sérieusement et concrètement ce que veut dire REGULER

Je vous engage à lire la définition que l’on peut trouver dans Wikipedia.
Et OBJECTIVEMENT, qui peut dire qu’il ne faut pas réguler et surtout qui peut dire que l’Internet n’est pas régulé ?

L’Internet est régulé depuis la nuit des temps pour le maintenir en condition opérationnelle et en état d’interopérabilité permanente.
L’Internet est régulé par les opérateurs eux-mêmes qui prennent des mesures techniques pour empêcher de trop grosses catastrophes.
L’Internet est régulé par le principe du “best effort” qui est une valeur qui tire vers le haut en impliquant le maximum de monde au bénéfice collectif et à la gestion de ressources communes.
L’Internet est “régulé” par des “valeurs” qui sont peut être d’un autre âge pour certains mais qui concernent un grand nombre d’entre nous. Des règles que j’ai déjà maintes fois rappelées et que vous trouverez ici.

C’est certain que je n’aime pas la définition suivante, qui me semble trop proche de la compréhension de Monsieur Lefebvre :

La régulation des procédés industriels regroupe l’ensemble des moyens matériels et techniques mis en œuvre pour maintenir une grandeur physique à régler, égale à une valeur désirée, appeléeconsigne.

Mais je trouve cette définition suivante intéressante, même si elle n’est pas forcément très en phase avec le rôle d’un opérateur, que je décrivais par le passé : “être électriquement le plus neutre possible et faire de son mieux pour qu’un paquet entrant dans son réseau en ressorte le plus vite possible, le moins modifié possible” :

Dans une définition correspondant aux transport ou a la logistique, la régulation désigne les techniques permettant d’organiser les flux de marchandises, de voyageurs, de véhicules, de manière optimale, et, lorsque cela est possible conformément a un plan prévu a l’avance. Elle se rapproche alors de la définition industrielle du terme: détecter les non conformités (retard, bouchons, pannes incidents de toute sorte altérant le déroulement du plan de transport) et ramener la situation a la normale, a ce qui est conforme au plan, le plus vite et avec le moins de conséquences possibles.

On pourrait débattre longtemps de cette dernière notion car elle implique une certaine “intelligence” dans le réseau, alors qu’habituellement, les solutions Internet sont plus diffuses et l’intelligence de contrôle y est plus décentralisé. Mais c’est juste une illustration, pour mieux expliquer pourquoi, à mon sens avant de répondre à la question “Faut-il réguler l’Internet”, il faudrait déjà commencer à définir la notion de ce mot.
Il ne sert à rien de mettre des gens devant une caméra pour discuter d’un sujet où chacun ne s’entend même pas sur le sens du débat.
La notion de REGULER de Monsieur Lefebvre n’a rien à voir avec cette de Monsieur Séguéla et c’est encore autre chose pour Monsieur Google et je ne parle même pas de Benjamin ;-)

Une fois cette définition posée, on aurait pu vraiment entrer dans le débat :

  1. Qui doit réguler l’Internet ?
  2. Comment ?
  3. Pourquoi ?
  4. Jusqu’où aller ?
  5. Comment peut-on contrôler que l’on n’en fait pas trop et que les “consignes” sont respectées ?
  6. Comment peut-on s’assurer de la performance, de la qualité et de l’inter-opérabilité du résultat ?

Mais cela, c’est une autre histoire … et cela mériterait un autre débat, qui ferait sans doute audience et à coup sûr avancer la compréhension du sujet, comme la marche du siècle en 1996, avec toutes ses imperfections, l’avait fait en son temps.

Et enfin, j’aurais aimé avoir un débat, dans la sérénité et non dans l’indignation cathodique. Ses faux atermoiements finissent par fatiguer et Séguéla n’a plus le talent ou la capacité à égaler les Verges et Collardd’antan … arrêtons la télé spectacle et allons un peu au fond des choses svp. Je pensais que c’était le sujet sur nos chaines publiques.

En attendant, jugez vous même … une pierre de plus dans la déconstruction médiatique d’un Monsieur que l’on aimait bien et qui avait presque réussi à nous faire croire que Citroen fabriquait des voitures de sport.
Trop fort, je vous dis.

Mais Jacques, s’il te plaît, trouve un autre cheval de bataille ou retourne à l’écriture de livres car l’Internet est un sujet trop sérieux pour te le laisser malmener ainsi. L’Internet est un sujet qui nécessite que l’on réunisse et que l’on construise, pas que l’on reste dans la polémique stérile et dans l’opposition systématique.

» Article initialement publié sur www.jmp.net

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Le Portail des Copains : 10 ans de saloperies sur Internet http://owni.fr/2009/11/24/le-portail-des-copains-10-ans-de-saloperies-sur-internet/ http://owni.fr/2009/11/24/le-portail-des-copains-10-ans-de-saloperies-sur-internet/#comments Tue, 24 Nov 2009 10:00:18 +0000 Alfred-Georges (Brave Patrie) http://owni.fr/?p=5670 Ce 19 novembre marque le triste dixième anniversaire de la création de Rezo.net, un portail impliqué dans de nombreux déraillements d’opérations de communication gouvernementale. Malgré la vigilance des autorités, un vaste torrent d’immondices s’en déverse toujours et sape la stabilité de l’internet libre, marchand et poli. Dans le monde entier on s’organise pour faire face à la menace, mais le combat est loin d’être gagné.




« Sur Internet, personne ne sait que vous êtes un chien », dit l’adage. Mais, paradoxalement, personne n’a oublié que vous arrachiez les ailes des mouches quand vous aviez huit ans. Une erreur de jeunesse comme nous en avons tous commises, sauf peut-être les tapettes, mais qui vous suivra toute votre vie.
Cette dichotomie mammifère / diptère joue en défaveur de la présomption d’innocence et abolit toute confiance en la bonté intrinsèque du genre humain en général et du personnage public français en particulier.
Les plus grands penseurs de notre temps en sont conscients : Jacques Séguéla ou Jean-François Copé et Henri Guaino ne disent pas autre chose quand ils qualifient internet de saloperie ou de zone de non-droit.
Nathalie Kosciusko-Morizet non plus quand elle milite en faveur d’un droit à l’oubli, qui permettrait en outre de libérer plusieurs téra-octets sur les serveurs de Dailymotion quand arriveront les tours de Frédéric Lefebvre et Christian Vanneste.

JPEG - 24.8 koL’internet que Rezo vous propose : des saletés.


Internet n’était pas censé héberger des archivistes obsédés par le mois de novembre 1989 et l’agenda du président de la République. Pas plus qu’il ne devait devenir un forum d’apprentis constitutionnalistes européens pinailleurs ou se substituer à la structure RH de prestigieux établissements publics alto-séquanais.
Internet devait être un megamall bien éclairé, sécurisé et fourni en produits très colorés. Avec des annonces positives qui sortent des haut-parleurs. Et une voiture à gagner tous les jours.
Ce qu’il est, pour l’essentiel, mais les casseurs et emmerdeurs de tout poil rôdent près du portail en bois du fond : Rezo.net.


JPEG - 89.9 koL’internet que nous voulons : des couleurs, de la simplicité, des prix écrits gros.




Ce Portail des Copains est malheureusement une nébuleuse insaisissable. Si Rezo.net existe bien en tant que lieu, celui-ci est creux et n’est qu’une caisse de résonance pour les déviances d’individus domiciliés ailleurs, ce qui rend impossible toute tentative de décapiter proprement le web anarcho-autonome francophone.
Les autorités l’ont appris à leurs dépens il y a quelques années en tentant de démanteler le portail au cours d’une vaste manœuvre policière. Si l’opération a pu un temps sembler être couronnée de succès, la victoire n’a été que temporaire et les terroristes se sont bien vite adaptés. Certes, Pierre Lazuly passe aujourd’hui plus de temps à taquiner le bar que la muse et Rezo référence parfois le journal de Laurent Joffrin, mais il ne s’agit que d’arbrisseaux qui cachent la jongle conradienne.

On a cru un instant que la révolution des usages d’internet survenue avec l’avènement des réseaux sociaux allait bouleverser la donne et détourner les lecteurs innocents de la propagande véhiculée par Rezo, en plus qu’ils allaient fournir des données comportementales de première bourre pour affiner une relation 360 avec le prospect.
Il n’a malheureusement pas fallu longtemps pour que les cerveaux du portail réagissent et sortent leur propre réseau social sans publicité et peuplé de per.sonn.es imaginaires.
Bien entendu, cela a fait pleurer les spécialistes du marketing 360, qui commencent à se poser des questions sur l’authenticité des per.sonn.es présentes sur Facebook. Il pourrait après tout bien s’agir de chiens.

JPEG - 19.6 koLa blogosphère est rongée par Rezo.



En attendant de trouver un moyen imparable d’interdire les malfaisants, les acteurs officiels du net se résignent à coopter les trouble-fêtes.
La gratuité du système Rezo ne saurait faire long feu face à cette reprise en main rémunérée : on observe une migration de blogueurs qui naguère se plastronnaient d’intégrité vers diverses entreprises de conseil ou initiatives partisanes. D’autres se mettent au billet sponsorisé. D’autres encore assurent qu’ils vont voter DSK.
Il y aura un Rezo.net que tant qu’il restera des blogueurs déplaisants ou des journalistes ingrats, mais un internet propre est possible si chacun le désire assez.
Vous savez ce qu’il vous reste à faire.


» Article initialement publié sur Brave Patrie

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Octobre 2009, au rendez vous des rétrogrades http://owni.fr/2009/10/31/octobre-2009-au-rendez-vous-des-retrogrades-finkielkraut-plenel-seguela/ http://owni.fr/2009/10/31/octobre-2009-au-rendez-vous-des-retrogrades-finkielkraut-plenel-seguela/#comments Sat, 31 Oct 2009 18:11:23 +0000 Thierry Crouzet http://owni.fr/?p=5061 Hoog

Décidément, il se passe quelque chose d’étrange en France en ce moment. De plus en plus de gens s’affirment comme de fieffés conservateurs. La droite nous y avait habitués. Mais nouveauté, c’est maintenant au tour d’une certaine frange non négligeable de l’intelligentsia.

Nous avons vu les artistes défendre Hadopi et la réduction des libertés numériques pour préserver leurs revenus (c’est ce qu’ils croyaient). Nous avons vu la gauche ne pas trop se mouiller dans cette histoire, et même parfois déraper. Et puis est arrivé octobre, ce fut une véritable avalanche de déclarations catastrophiques : Wolton, Finkielkraut, Séguéla, Plenel, Klein… Notre monde se désintègrerait et plus rien ne serait à sauver. Il faudra que quelqu’un ait le courage d’écrire l’histoire de cet octobre noir.

À vrai dire, je me réjouis. Tout ce beau monde comprend enfin qu’il se passe quelque chose d’important, quelque chose d’historique qu’ils ont raté. Alors ils cherchent à dénigrer. Un des derniers en date, Emmanuel Hoog, avec son livre Mémoire année zéro. J’avais vu l’annonce passer, j’avais laissé passer, un peu fatigué des rabat-joies. Puis aujourd’hui, Bertrand Keller me site et site Hoog en même temps. Du coup, je lis son interview dans Le Monde. Je respire, le bonhomme est plus modéré que ceux déjà épinglés.

Notre demande de mémoire a grandi plus vite que notre capacité à produire de l’histoire, dit Hoog. Voilà ce que j’appelle l’”inflation mémorielle”. Trop de mémoire tue l’histoire. Paradoxalement, faute de repères historiques clairs, nous nous réfugions dans la nostalgie, aggravée aujourd’hui par le phénomène d’Internet, qui fait mémoire de tout. Désormais, le concept s’est privatisé : on ne se contente plus du quart d’heure de célébrité promis à chacun par Andy Warhol, tout le monde veut sa part de mémoire, à travers lui-même, à travers le numérique.

Mais l’histoire est en mouvement, plus que jamais. Si je ne me trompe pas, si nous passons de l’Histoire au Flux, c’est un évènement extraordinaire qui est en train de se jouer. Et ce ne serait pas de l’histoire ça ? Et si avec ce passage au Flux nous réussissions à adresser quelques problèmes majeurs comme la pauvreté ou les dérèglements écologiques ? Comme toujours, il faut juste apprendre à regarder l’histoire dans la vie. Notre histoire n’est tout simplement pas écrite, c’est à nous de la vivre d’abord, puis de l’écrire en suite.

Quelle importance qu’il y ait inflation mémorielle ? Il y a déjà des siècles qu’un homme n’a aucune chance de lire tout ce qui a été produit, de voir tout ce qu’il y a à voir. Qu’il y ait cent fois plus, mille fois plus, ne change rien. Nous donnons simplement plus de chance à la sérendipité (je développe dans mon prochain livre).

Hoog voudrait que soit mise en œuvre une politique de la mémoire. Je commence à me méfier même si j’admets qu’on ne peut pas laisser faire n’importe quoi à Google. Mais eux, au moins, ils bossent. Une politique de la mémoire serait de ne pas empêcher tel ou tel de mémoriser, mais de participer à ce mouvement, de maximiser la duplication des données pour nous mettre à l’abri en cas de crash, de catastrophe, de dictature…

Au final, Keller pose une question qui me paraît beaucoup plus importante que celle de Hoog.

Pour autant nous pouvons nous poser la question de savoir si notre famille, nos amis, notre société conservent une histoire suffisamment partagée pour que nous puissions nous comprendre et continuer à communiquer.

Je crois justement que le flux rend indispensable les histoires, il les rend plus nécessaires que jamais car il n’y a plus pour chacun une histoire pré-tracée. Aucune case sociale ne nous attend. Nous devons nous construire un chemin de vie et les histoires des autres participent à notre initiation.

» Article initialement publié sur Le peuple des connecteurs

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Le mythe de la désinformation sur internet http://owni.fr/2009/10/27/le-mythe-de-la-desinformation-sur-internet/ http://owni.fr/2009/10/27/le-mythe-de-la-desinformation-sur-internet/#comments Tue, 27 Oct 2009 17:01:17 +0000 Stanislas Jourdan http://owni.fr/?p=4966 L’un des paradigmes de l’internet, c’est l’égalité entre les internautes. Sur internet, tout le monde peut s’exprimer publiquement sans aucunes barrières si ce n’est celle de disposer d’une connexion à internet. De nombreux services gratuits favorisent d’ailleurs cela, et notamment les blogs (et cela devient de plus en plus facile avec des outils comme posterous ou Tumblr). En un mot, internet favorise la liberté d’expression.

CC Dreamsjung

CC Dreamsjung

Cette idée, plutôt positive au départ, fait pourtant peur à de nombreuses personnes. En effet, si l’on donne la parole à tout le monde (et donc n’importe qui), n’y a-t-il pas des dérives possibles? C’est en tout cas le discours d’un certains nombres de détracteurs (et bien souvent non-usagers) du net, Séguéla, Finkielkraut, Olivennes en tête, qui pensent qu’ internet est le paradis de la désinformation et de la diffamation. (bouh!)

Sans aller aussi loin, un ami m’a récemment fait part de ses réflexions sur le sujet :

(…) je pense qu’internet présente aussi des dangers, celui d’une part de pouvoir dire tout et n’importe quoi sans presque craindre de sanction, d’accusation de diffamation surtout si on fait ça anonymement, et d’autre part, tu parles parfois de “blogueurs influents”, et de là vient aussi un danger: Peut être qu’au fur et à mesure, internet va se structurer et des leaders d’opinion, comme en politique, vont émerger, peut être sans toujours dire la vérité! Internet pour moi présente surtout un danger contre la liberté: Le fait qu’une vidéo puisse être vue par des millions de personnes en moins de 24h est très dangereux: Une minorité de blogueurs peuvent détruire quelqu’un juste parce que ce dernier n’a pas les mêmes idées qu’eux.

Je suis persuadé que ces inquiétudes sont infondées, et je vais essayer de vous montrer pourquoi.

Prenons l’exemple d’un blogueur qui écrit un pamphlet infondé contre un homme politique connu. Que se passera-t-il?

Ecrire, c’est bien, être lu, c’est mieux …

Tout d’abord, si le blog est récent ou peu connu, il y a de fortes chances pour qu’il sera totalement ignoré et/ou que le billet ait très peu d’impact. En effet, tout blogueur ne naît pas “influent”! Et j’irai même plus loin : la plupart des blogs n’appartiennent même pas à la blogosphère ! En effet, un blog en fait réellement partie à partir du moment où ce blog est lu, commenté, repris par d’autres etc. Si ce n’est pas le cas, la tentative d’intox ne sera ni plus ni moins qu’un coup d’épée dans l’eau.

L’influence du blogueur : une question de confiance

Devenir “influent” est un (long) processus qui exige :

  • d’écrire des billets intéressants, de bonne qualité rédactionnelle, et bien sourcés.
  • d’être présent sur les réseaux sociaux : twitter, friendfeed ou autres, et y faire preuve de crédibilité.
  • de faire une veille informationnelle intense (pour trouver les bons liens notamment)
  • du temps et de la patience

Tout ce processus permet petit à petit de gagner la confiance des internautes, confiance qui est non seulement très longue à acquérir, mais peut aussi être perdue très rapidement ! A ce titre, même un blogueur connu n’a pas du tout intérêt à mentir à ses lecteurs, car il mettrait sa crédibilité en péril (et perdrait donc son audience).

Au passage, on remarque également que cette perte de confiance peut également affecter ceux qui relaient ces fausses informations via les réseaux sociaux !

L’importance du statut, y compris sur internet

De plus, il faut aussi que le blogueur ait une certaine crédibilité vis à vis du sujet dont il parle : une compétence particulière, des expériences, un statut. Ainsi, le fait d’écrire sous un pseudonyme peut éveiller la méfiance des lecteurs.

Je ne dis pas que le statut de la personne fait tout, mais si le blog est peu connu, cela joue énormément. D’ailleurs, savez-vous que la page “about” d’un blog (en général là où le blogueur se présente) est en général l’une des pages les plus visitée d’un blog ?

Les blogueurs hors d’atteinte de la loi ?

Là encore, une idée trop souvent admise par beaucoup de gens, à tort bien évidemment. La diffamation, comme dans la presse ou n’importe quel autre média est réprimée pénalement. D’ailleurs, le blogueur risque bien plus qu’un journaliste (par exemple) puisque le blogueur est personnellement responsable du contenu du blog, tandis que le journaliste (sauf indépendant) agit dans le cadre de son activité professionnelle (donc responsabilité du journal).

Il y a d’ailleurs déjà eu des exemples de blogueurs inculpés en justice, y compris sous anonymat (et parfois même absurdes) ! En fait, le concept même d’anonymat est à relativiser : il n’y a pas d’anonymat absolu sur internet !

Bon ok, mais admettons quand même qu’une intox se répande ?

De l’importance des commentaires…

Si l’on trouve des incohérences, un simple commentaire permettra de démentir l’information, et (encore une fois), c’est toute la crédibilité du blog qui s’en trouvera affectée. D’ailleurs, plus le blog est visité, plus il y a de chances qu’un lecteur avisé signale l’entourloupe… Et de fait la bombe se désamorce d’elle-même :) …

Et si les commentaires sont censurés, c’est encore pire car cette pratique sera très probablement dénoncée sur d’autres blogs ou les réseaux sociaux comme par exemple ici :

martinon-censure

La désinformation sur internet est donc un faux problème. Le débat est ailleurs.

Lecteur et information : un nouveau rapport

Je crois qu’il faut donc voir le problème d’une manière différente : après des décennies de médias de masses, de messe du JT, bref d’information à avaler telle quelle (sous prétexte de neutralité des médias), le processus et les acteurs générant de l’information ne sont plus du tout les mêmesce qui nécessite de fait que nous nous y adaptions.

Il revient désormais à chacun de prendre ses distances avec ce qu’il lit : l’article est-il sourcé ? Que disent les commentaires ? Qui en est l’auteur ? Autant de questions que nous devons nous poser à chaque fois que nous nous informons.

La bonne nouvelle c’est qu’internet est formidable pour cela : l’abondance d’informations permet de vérifier rapidement l’existence des prétendues sources, ou encore de les croiser avec d’autres.

De plus, je suis persuadé que ce processus est très vertueux pour chacun dans le sens où cela fait davantage appel à notre capacité d’analyse, de recul, et à nos connaissances précédemment acquises. En somme, internet nous amène à devenir acteurs dans ce nouvel écosystème de l’information…

Conclusion

Internet nous amène donc non seulement à repenser la manière dont nous nous informons (comme je l’avais déjà expliqué dans mes premiers billets), mais surtout à repenser notre manière d’appréhender cette information.

Globalement, le système s’autorégule et n’a pas besoin d’intervention externe pour limiter les dérives. Et même s’il y en a (et il y en aura encore), je préfère me réjouir des incroyables avancées que les médias sociaux permettent, et de leurs effets positifs, notamment pour la démocratie :).

Je crois qu’il faut également garder à l’esprit que tout cela reste très nouveau et qu’un temps d’adaptation/apprentissage est donc nécessaire.

Et c’est un véritable défi pour notre société. Êtes vous prêts à le relever ?

Article initialement publié sur Tête de Quenelle !

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A lire ailleurs :

Internet et la fin des intellectuels en perruque – [Enikao]

La transparence est la nouvelle objectivité – Transnets

“Le net est la plus grande saloperie qu’aient jamais inventée les hommes” – BugBrother

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http://owni.fr/2009/10/27/le-mythe-de-la-desinformation-sur-internet/feed/ 3
Au coeur du lobby de l’Internet (…) http://owni.fr/2009/10/19/au-coeur-du-lobby-de-linternet-je-me-sens-faire-partie-de-la-plus-grande-saloperie-que-les-hommes-aient-inventee/ http://owni.fr/2009/10/19/au-coeur-du-lobby-de-linternet-je-me-sens-faire-partie-de-la-plus-grande-saloperie-que-les-hommes-aient-inventee/#comments Mon, 19 Oct 2009 15:35:56 +0000 Vinvin http://owni.fr/?p=4743

je me sens faire partie de la plus grande saloperie que les hommes aient inventée !

Ces dernières semaines ont été éprouvantes pour l’être humain que je suis.

J’ai la sensation toute nouvelle d’avoir contribué à l’ignominie généralisée qui s’est emparée des médias. Instrument de la technologie en marche, j’ai profité des réseaux sociaux pour dénoncer des actes qui ne le méritaient pas. En effet, quand on pense à ce qui se passe en Iran, au Pakistan ou même simplement à France Télécom, comment peut-on avoir eu l’audace d’aborder des sujets mineurs tels que Jean Sarkozy, Polanski ou Frédéric Mitterrand… J’ai honte de moi.

Quand j’entends mes maîtres à penser, Alain Finkielkraut et Jacques Séguéla, je réalise soudain à quel point j’ai reproduit sans le vouloir le fonctionnement des élites, profitant de mon pouvoir de blogueur influent pour manipuler les journalistes de la presse traditionnelle et, par voie de conséquence, la population Française qui n’en demandait pas tant. Sans moi, sans mes Twitts assassins, rien n’aurait été dit sur rien, et l’élection de Jean Sarkozy à l’EPAD serait passée comme une lettre à la Poste, ou ce qu’il en reste. Je m’en veux Alain. Je me mortifie Jacques. Moi aussi je regrette l’ancien Régime, quand j’avais la chance de me contenter de vous admirer sur les plateaux de télévision, vous qui savez ce qui est bon pour mon peuple et pour ma famille. Je n’oublie pas la “Force Tranquille”, ni “La défaite de la pensée”, ces concepts forts qui ont bercé ma jeunesse …

Je n’avais pas idée en ouvrant ce blog que, comme vous, je pourrais m’exprimer. Et pire, communiquer avec mes concitoyens. C’est qu’on prend goût à cette liberté, c’est fou comme je comprends, avec le recul, l’attachement que vous portez à ce privilège. Pourquoi ne me suis-je pas contenté de cracher ma bile au bar du café de la gare ; ou au déjeuner du dimanche en cuvant mon Cognac, devant le Grand Prix sur TF1. Mais non, c’est tout moi, il a fallu que j’ouvre ma gueule. Je m’en veux, j’ai honte.

Jacques, vous qui avez inventé la publicité, bien avant David Ogilvy ou Marcel Bleustein-Blanchet, vous savez à quel point les vrais gens sont volatiles et je vous jure que je vais faire de mon mieux pour les remettre dans le droit chemin, et militer pour la fermeture de leurs blogs, de leurs pages Facebook ou Youtube, de leurs boîtes emails si corrosives et irrespectueuses. Avec vous Jacques, nous pourrons continuer à affirmer tout ce que l’on veut sans que personne ne vienne nous contredire, comme avant, avant que le monde ne devienne cette poubelle sans morale et nauséabonde. Aidez-moi, Jacques, à remettre de la dignité dans ce monde de populos parvenus qui pensent qu’ils ont du pouvoir alors que si ça se trouve ils n’ont même pas de travail les cons. Alain ? Je ne dirai plus de mal des gens, jamais, c’est promis.

Je n’utiliserai plus des images volées, ou si je le fais je demanderai la permission à la rue d’Ulm avant, pour comprendre mes fautes et la direction de ma pénitence.

Mes copains du Lobby du net et moi on va retourner à notre place, les bas-fonds du silence, cette place que nous n’aurions jamais dû quitter.

Jacques, je t’aime. Je te désire Alain.

> Article initialement publié sur http://www.vinvin.org/ ]]> http://owni.fr/2009/10/19/au-coeur-du-lobby-de-linternet-je-me-sens-faire-partie-de-la-plus-grande-saloperie-que-les-hommes-aient-inventee/feed/ 3