OWNI http://owni.fr News, Augmented Tue, 17 Sep 2013 12:04:49 +0000 http://wordpress.org/?v=2.9.2 fr hourly 1 Marine Le Pen se plante au Maroc http://owni.fr/2012/03/28/marine-le-pen-se-plante-au-maroc/ http://owni.fr/2012/03/28/marine-le-pen-se-plante-au-maroc/#comments Wed, 28 Mar 2012 17:21:08 +0000 Pierre Leibovici http://owni.fr/?p=103965 OWNI-i>TÉLÉ. En tête depuis dix jours, Jean-Luc Mélenchon creuse encore un peu plus l'écart, tandis que Marine Le Pen reprend sa chute au bas du classement.]]>

Le temps est au changement dans le classement du Véritomètre, permettant de vérifier l’exactitude de toutes les déclarations chiffrées ou chiffrables des six principaux candidats à l’élection présidentielle. Pendant que Jean-Luc Mélenchon renforce ses positions à la tête du classement – avec 63,4% de crédibilité, François Bayrou s’éloigne à nouveau de la troisième place occupée par François Hollande.

Ces dernières 24 heures, l’équipe du Véritomètre a vérifié 42 citations chiffrées des candidats à la présidentielle.

C’est une chronique un peu spéciale que nous vous proposons aujourd’hui, puisqu’elle concerne les “serpents de mer du Véritomètre”, ces données introuvables dont l’équipe n’aurait réussi à se départir sans une précieuse aide, celle des internautes que nous avons interpellés sur Twitter et Facebook.

Manque de culture marocaine chez Marine Le Pen

Pour illustrer le manque de compétitivité de l’agriculture française, Marine Le Pen a choisi d’estimer le coût horaire du travail agricole au Maroc. Lors de son marathon télévisé dans l’émission Parole de candidat, le 5 mars dernier, elle déclarait ainsi :

Les Marocains, ils sont payés cinq euros de l’heure, les ouvriers agricoles marocains.

Une statistique que l’équipe du Véritomètre avait tenté de chercher sur les sites du Haut commissariat marocain au Plan, de l’ambassade de France au Maroc ou encore de la Banque mondiale. En vain. La solution s’est avérée plus simple, elle nous a été soufflée par @Brevesdetrott, qui a eu la bonne idée de fouiller le site du ministère marocain de l’Emploi et de la Formation professionnelle.

Résultat : la candidate du Front national surestime très largement le coût du travail agricole de l’autre côté de la Méditerranée. La statistique que nous avons trouvée et qui se rapproche le plus du chiffre évoqué par Marine Le Pen est celle du salaire minimum journalier dans l’agriculture, sur le site du ministère marocain de l’Emploi, donc. Il s’élevait à 60,63 dirhams en 2011, soit environ 5,5 euros de 2011, si l’on s’en tient au taux de change donné par le ministère des Affaires étrangères. Les ouvriers agricoles marocains ne sont donc pas payés près de 5 euros par heure, mais par jour.

Dans sa volonté de décrire le défaut de compétitivité de la France face au Maroc, Marine Le Pen eût été mieux avisée de ne pas surestimer le coût du travail agricole outre-Méditerranée.

Nicolas Sarkozy bride l’export

C’était l’une des premières interventions vérifiées par l’équipe du Véritomètre, l’interview sur huit chaînes de télévision du Président – encore présumé candidat – le 29 janvier 2012. Nicolas Sarkozy avait alors choisi de privilégier “l’exemple allemand”, comme OWNI le décryptait le lendemain, qui fait bien mieux que la France à l’export :

Nous avons 100 000 entreprises qui exportent en France.

Avec une précision digne des plus fervents vérificateurs de données, @Keyridan a sorti de terre pas moins de quatre statistiques différentes sur le nombre d’entreprises françaises qui travaillent à l’exportation. Celle que nous avons retenue provient d’une étude du ministère des Finances [PDF], publiée en août 2011, qui évaluait leur nombre à 125 111 en 2010 (page 4). Soit 20,1% de moins que l’estimation de Nicolas Sarkozy, qui manque décidément de confiance en l’appareil exportateur français.

François Hollande n’aime pas les riches

L’UMP a pour habitude de lui rappeler, François Hollande avait bel et bien déclaré en 2006 : “Je n’aime pas les riches, j’en conviens”. Six ans plus tard, et avec un peu plus de diplomatie, le candidat socialiste s’en prend d’abord aux plus aisés qui délaissent la France, les exilés fiscaux. Dont il dit, dans une interview à RTL, le 29 février dernier :

Le bouclier fiscal il avait été inventé par Nicolas Sarkozy pour faire revenir des capitaux.. Aucun n’est revenu !

Le désormais célèbre “bouclier fiscal” désigne la mesure instaurée par la loi du 21 août 2007 en faveur du travail, de l’emploi et du pouvoir d’achat (TEPA), et limitant à 50% de ses revenus le maximum d’impôts directs payés par un contribuable, contre 60% auparavant.

Bien que supprimé depuis, les incidences du bouclier fiscal restent difficiles à estimer, notamment pour l’équipe du Véritomètre qui n’avait trouvé aucune donnée officielle à l’époque de cette vérification.

Heureusement, @arnocast nous a mis sur la piste d’un rapport du Conseil des prélèvements obligatoires datant de mai 2011 [PDF], et mentionnant le solde de départs et de retours en France de contribuables assujettis à l’Impôt de solidarité sur la fortune (ISF). Ses résultats (page 294) confirment ici le propos de François Hollande. Pour le début du quinquennat, du moins – des données plus récentes n’étant pas encore disponibles -, 982 contribuables qui payaient l’ISF ont quitté la France en 2007 et 2008.


Les vérifications des interventions sont réalisées par l’équipe du Véritomètre : Sylvain Lapoix, Nicolas Patte, Pierre Leibovici, Grégoire Normand et Marie Coussin.
Retrouvez toutes nos vérifications sur le Véritomètre et nos articles et chroniques relatifs sur OWNI
Illustrations par l’équipe design d’Owni /-)

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Supprimer l’ISF pour récompenser la paresse http://owni.fr/2010/11/18/supprimer-lisf-pour-recompenser-la-paresse-nicolas-sarkozy-impots-rentiers-bouclier-fiscal/ http://owni.fr/2010/11/18/supprimer-lisf-pour-recompenser-la-paresse-nicolas-sarkozy-impots-rentiers-bouclier-fiscal/#comments Thu, 18 Nov 2010 11:12:17 +0000 Alexandre Delaigue (Econoclaste) http://owni.fr/?p=37223 Notre président a des intentions claires pour réformer la fiscalité française. Supprimer l’Impôt sur la Fortune et le remplacer par :

un nouvel impôt sur le patrimoine dont l’idée est la suivante : l’erreur faite dans les années passées, c’était de taxer le patrimoine alors qu’il vaut mieux taxer les revenus du patrimoine et les plus-values du patrimoine […] C’est l’axe de la réforme que nous allons engager

L’impôt sur les revenus du capital : la prime aux rentiers

Un petit rappel. L’impôt sur la fortune est un impôt dont le principe est efficace. Considérons, comme le faisait F. Meunier, un individu qui détient un patrimoine de 100 millions d’euros. Il peut gérer son patrimoine de trois façons. Il peut faire des efforts, et celui-ci lui rapportera 6% annuels. Il peut modérer ses efforts, et gagner seulement 3% annuels. Ou alors, il peut être paresseux et dispendieux, auquel cas son patrimoine ne lui rapporte aucun intérêt annuel.

Introduisons maintenant un impôt sur le capital, correspondant à 1% du patrimoine total détenu. Chacune des stratégies-ci dessus implique le même montant d’impôt payé : un million d’euros annuels. La stratégie de l’effort intense rapporte désormais 5 millions d’euros. Celle de l’effort modéré, 2 millions d’euros. La stratégie dispendieuse, quant à elle, conduira l’individu à perdre un million d’euros par an. Les finances publiques reçoivent trois millions d’euros (en comptant trois individus appliquant chacune des différentes stratégies).

Remplaçons maintenant cet impôt sur le capital par un impôt sur les revenus du capital. Pour que ce remplacement soit neutre pour les finances publiques, chacun pourra vérifier qu’il faut un impôt de 33% des revenus du patrimoine. Dans cette situation, la stratégie courageuse rapporte désormais 4 millions d’euros. La stratégie de l’effort modéré laisse un gain inchangé, de deux millions d’euros. Le dispendieux paresseux, quant à lui, ne paiera aucun impôt. Le total collecté par l’Etat sera toujours de trois millions d’euros.

Mais vous le voyez tout de suite : les conséquences distributives de l’opération ne sont pas du tout neutres. En effet, celui qui dans cette situation paie le plus d’impôts est celui qui fait le plus d’efforts pour rendre son patrimoine productif. Celui qui à l’inverse le laisse en jachère, est le grand bénéficiaire de cette transformation.

Encourager la vieille tradition française du capitalisme d’héritier

Ce résultat est on ne peut plus connu en économie de la fiscalité. Un impôt sur le patrimoine peut être assimilé à un impôt forfaitaire, qui est déterminé indépendamment de l’usage fait du capital : le propriétaire de capital est donc incité à le rentabiliser. Un impôt proportionnel sera moins incitatif. Si l’effort à fournir pour rentabiliser le capital à hauteur de 6% est important, notre capitaliste se dira qu’il vaut mieux pour lui fournir l’effort limité. Alors qu’avec l’impôt sur le patrimoine le fils à papa dispendieux constatait que sa vie dissolue conduisait son patrimoine à diminuer, ce qui pouvait l’inciter à passer sa licence faire des efforts, désormais, cette pression n’existe plus.

Cette efficacité économique apportée par l’ISF avait déjà été sérieusement rognée par le bouclier fiscal et les multiples et abondantes niches fiscales. On peut noter également que l’analyse ci-dessus est trop simple. Elle devrait inclure d’autres effets incitatifs : l’incitation à l’expatriation ou l’évasion fiscale, qui n’est sans doute pas très grand, contrairement aux idées reçues); le fait que des techniques d’optimisation fiscale (par exemple en versant un peu moins de dividendes) permettent de corriger cet effet. Pour ces raisons, F. Meunier en concluait qu’il vaudrait mieux supprimer et bouclier fiscal et ISF, quitte à attendre qu’un gouvernement de l’autre bord le remplace « par une façon plus intelligente de faire payer le patrimoine ».

Il n’en reste pas moins que cette réforme, si elle est mise en place, reviendra premièrement à favoriser une tare typiquement française : encourager le capitalisme d’héritiers, cette conception très XIXe siècle dans laquelle les manants entreprenants ne doivent pas s’enrichir : seuls ceux qui disposent d’un gros capital et l’accumulent (ou en héritent) sont dignes d’être considérés comme des élites nationales. Il ne sera plus nécessaire, pour entretenir le manoir familial, de le louer à quelques périodes de l’année à un prix dérisoire pour acquitter l’impôt. Il faut dire que cela risquait de faire venir des gens pas convenables.

La victoire du « travailler moins pour gagner plus »

La seconde conséquence de cette réforme, ce serait une bien curieuse inversion de la formule qui a fait tout le succès de l’élection présidentielle de 2007 : travailler plus pour gagner plus. Il est vrai que les moyens de politique économique utilisés pour cela ont largement échoué. La défiscalisation des heures supplémentaires est un échec tout aussi coûteux que retentissant, Le RSA, sensé inciter les pauvres à travailler plutôt qu’à rester dans une culture d’assistanat, est entré de plein fouet dans le mur d’une crise économique qui restreint considérablement les possibilités de travailler tout court. Il va falloir songer à d’autres modes d’indemnisation (à ce propos, un petit lien pour les geeks).
Bref, « travailler plus pour gagner plus » est sérieusement écorné par le remplacement d’un mécanisme incitant au travail par un mécanisme qui récompense la paresse. Le nouveau slogan, promis à n’en pas douter à un bel avenir, est désormais « travailler moins pour gagner plus ».

Billet initialement publié sur le blog des Econoclastes sous le titre Travailler moins pour gagner plus.

Photos FlickR CC @ Alex ; Malcolm Jackson ; Powerhouse Museum.

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