Marques et artistes, une idylle partie pour durer ? [1/2]

Le 4 novembre 2010

Focus sur les opérations de branding, ces partenariats où une marque se sert de la notoriété d'un artiste pour développer son image. Aurélien Sooukian analyse cette tendance en plein développement.

Aurélien Sooukian est le cofondateur et le directeur de By Music, une société de conseil et de création musicale à destination des professionnels de la communication et des médias.

Les relations entre artistes et marques existent depuis longtemps. Cependant, ces opérations de branding se sont massivement développées ces dernières années, devenant un source prépondérante de revenu pour certains artistes. Et un objectif à atteindre pour beaucoup d’autres…

D’un côté, les annonceurs…

L’abondance des messages publicitaires adressés au consommateur, la volatilité croissante des clients ou encore l’essor d’Internet – support de milliards de contenus à haute valeur ajoutée – sont autant de phénomènes pouvant entraver la visibilité des marques.

Qui, aujourd’hui, ne juge pas les ondes saturées ? Le paysage audiovisuel surencombré ?

De l’autre côté, les artistes et l’industrie du disque : démocratisation des outils de production audio, accessibilité offerte par Internet pour faire découvrir son talent (ou pas) au monde entier, fin du disque comme relais de développement unique… les créateurs de musique profitent de la révolution numérique mais doivent parallèlement redoubler d’efforts pour espérer trouver leurs publics et se constituer une fanbase rentable.

Et si dans cette nouvelle configuration les deux univers s’associaient pour créer du contenu ? Si le pouvoir médiatique et la puissance financière des premières servaient l’éclosion des seconds ? A moins que ce ne soit la notoriété d’artistes confirmés qui permettent à des campagnes de communication de décoller en quelques jours ?

Des synergies à haute valeur ajoutée

Les stratégies « traditionnelles » de développement tant pour les entreprises que pour les artistes et les labels ne suffisent plus. Le nouvel environnement de marché, sur fond de conjoncture difficile, oblige les deux parties à faire preuve d’une grande inventivité pour continuer à générer de l’attirance, de la préférence et donc du succès.

C’est ainsi que marier harmonieusement marque et musique dans des conditions originales est devenu l’un de leurs nouveaux enjeux. Qu’il s’agisse de lancer un produit ou rajeunir un coeur de cible, le nombre d’associations explosent car les synergies foisonnent.

Cette tendance a pris ces derniers mois de nombreuses formes dont la seule limite est l’imagination : multiplication des concerts et festivals organisés par les marques elles-mêmes (Paco Rabanne, Heineken…), synchronisation de titres « forts » en pub TV (Weezer/La Banque Postale, Jil is Lucky/Kenzo, Yael Naim/Apple…) jusqu’à la vente en avant-première de tickets de concerts aux clients d’une entreprise (Alicia Keys/Amex).

Les bons partenariats ont également cet avantage de faciliter le storytelling des deux côtés. On se souvient que la chanteuse Izia, au-delà de son réel talent, doit certainement une partie des récompenses obtenues aux dernières Victoires de la Musique à sa mise en avant dans la publicité Petit Bateau.

La marque de vêtement quant à elle, perçue au passage comme révélatrice de nouveaux talents, tire parti de la récente explosion médiatique de l’artiste. Une stratégie win/win dont le modèle va très probablement faire des émules dans un avenir proche.

Quand la musique est au coeur du “brand content”

Les marques comme les artistes ont donc besoin de créer un contenu singularisant et doivent désormais adopter une logique de storytelling pour se développer. Le sponsoring est une des options fréquemment choisie.

Parmi les précurseurs, Paco Rabanne poursuit le Black XS Live Show, et illustre son parfum féminin par un tour du monde musical en s’associant aux Français de la Blogothèque : ils réalisent des « concerts à emporter » (un concept à adopter), dans neuf pays du monde (Japon, Turquie, Espagne, Canada, Royaume-Uni, Argentine, Mexique, Chili et France) pour faire découvrir de nouveaux artistes venus de tous horizons. Faites donc un tour sur leur site et visionnez des vidéos insolites prises sur le vif, au coeur des grandes villes d’Europe et d’ailleurs !

Diesel U Music label, créé par le grand nom du jean, fait toujours le buzz une décennie après sa création, avec pour projet la promotion d’artistes non signés.

Myspace, bien qu’un peu chargé, vaut le détour. Plus collaboratifs encore, certains nous enrôlent dans des compétitions épicées. Pour se montrer, s’amuser, faire des rencontres ou décrocher le gros lot, le citadin prend les baguettes et orchestre la com’ de la marque brésilienne Havaïanas qui a lancé cet été une opération solaire à double enjeu : l’agence Enjoy ADS invite les volontaires à se rendre chaque jour dans un magasin de la marque et à y retirer un code pour se procurer en ligne des goodies exclusifs, et même une paire de tongs pour les plus assidus !

Mais le coeur de l’opération, annoncée sur tous les réseaux sociaux que nous fréquentons, se loge sur le site e-commerce de l’enseigne : les internautes doivent y mixer un clip à partir de sons tonguesques uniquement !

Même dans des secteurs moins funs comme l’assurance ou la banque, on use du co-branding dont les applications, à renfort de milliers d’euros, ne passent pas inaperçues.

Il y a ainsi désormais de la musique dans votre Carte Bleue : depuis 3 ans, le marketing se plie en quatre pour entrer dans une puce électronique et la Société Générale fait du bruit avec So Music, la carte de paiement Universal Music.

Elle permet (aux ados, en général) d’accéder à des offres promotionnelles sur le téléchargement légal de titres en ligne (www.somusic.fr), à 4 chaînes Web TV, à des cadeaux divers, et surtout à des offres de stages et d’emplois en lien avec la pratique musicale…Ici, chacun des deux acteurs tire parti de l’image de l’autre. Bon, 24 euros par an, le tarif est raisonnable et adapté à la cible, jeune. On regrette seulement que les playlists proposées ne soient pas suffisamment riches et diversifiées.

Retrouvez la deuxième partie de cet article

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Cet article a été initialement publié sur admirabledesign.com

Crédit photo cc flickr : jordi.martorell, crises_crs

Document remis : photo sennheiser

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